« Il est parti avec un air de grande pitié pour moi, mais je lui pardonne, car il n'a aucune idée de ce que peut être la sensation troublante, grisante, d'être le premier homme à pénétrer dans ces lieux enfouis sous des centaines de mètres de rocher, à connaître le pourquoi des sources, à contempler les formes admirables que l'eau taille à vif dans la chair du rocher ou celles qu'ailleurs elle dépose en étincelantes draperies calcaires, préservées de toute souillure humaine, splendeurs que nous sommes les seuls à avoir méritées. »
« Quand, après une dure expédition, je retrouve cette nature, je respire son odeur que vous ne connaissez pas, je vois sa beauté que vous ne voyez plus : en un mot, je la comprends. Pour aller explorer le gouffre que m'avait indiqué un vieux bûcheron, j'ai découvert, hors des routes et des sentiers, dans les déserts boisés du Vercors, la source fraîche, le sapin foudroyé, la clairière aux chanterelles, le repaire du renard... Vous ne les avez pas vus, vous êtes passé trop vite, loin sur la route. Et pourquoi seriez-vous venu là ? »
Michel LETRÔNE